Il a passé ses dix premières années en Nouvelle-Caledonie, où son père travaillait comme inspecteur des domaines de l'Etat. Chaque jour, il voyait passer, sous les fenètres de la maison familiale de la rue de la République, les bagnards enchainés en partance pour l'île de Nou et restera marqué toute sa vie par ces images ; puis il a résidé, au gré des mutations de son père à Châtillon-sur-Seine, Villefranche de Rouergue (1901) , Rodez (1905 à 1907), faisant de fréquents séjours chez sa grand-mère au 4, rue du Lycée à Nice.Il séjourna à Agen, où il est pion durant 4 mois avant de se faire « virer » par le proviseur, ayant été surpris d'avoir laissé sans surveilance les élèves dont il avait la charge Ces épisodes de vie en Agenais témoignent de sa personnalité et de son esprit bohème :
"Je suis arrivé là-bas en pantalons collants : Vous êtes indecent, monsieur Carcapino, me dit le proviseur Chacornac, mettez votre pardessus".J 'arrivai désormais en pardessus et en châpeau de paille". "Aux élèves qui ne savaient pas la leçon je donnais 18 , à ceux qui la savaient, 4. Il avait comme collègue le marquis Robert de la Vayssière qui portait une barbe rousse et qui buvait de l'ether au kirch dans les cafés et lorsqu'il était saoul auscultait les chiens
Au cours de ce séjour, il rencontra les jeunes poètes qui fonderont avec lui, dès 1911, l'école fantaisiste* : Jean Pellerin, Léon Véranne, de La Vayssière, Tristan Derème,... . Il monta à Paris en janvier 1910. Il à 23 ans et fréquente Montmartre. Un bon de consommation en poche, qu'il a découpé dans une revue, il se rend au « Lapin Agile », où il croise notamment Pierre Mac Orlan et Roland Dorgelès. Après avoir poussé avec succès la goualante (chantant des chansons des bats d'af) à l'invitation du père Frédé, maître des lieux, il est immédiatement accueilli à la grande table où se réunissent les bohèmes de ce temps. Ami d'Appolinaire, Max Jacob, Maurice Utrillo, Modigliani, Pascin. Il assura également la critique artistique dans les revues L'Homme libre et de Gil Blas. Il a publié son premier recueil, La Bohême et mon cœur, en 1912. Début 1913, Francis Carco retourna à Paris et s'installa au 13 quai aux Fleurs. Il rencontre Katherine Mansfield, compagne de John Middelton Murry, journaliste londonien. « Rebelle et pure jeune fille » originaire de Nouvel-Zélande, Katherine quitta quelques mois le domicile conjugal entamant avec Carco une relation troublante, inaboutie, un « amour voué au désastre », comme il le disait lui-même, qui le marquera jusqu’à la fin de ses jours. Il prête son appartement à Katherine pendant qu'il effectue son service militaire à Gray, près de Besançon. Il dira que cette dernière, dans les lettres qu'elle lui adressera alors de Paris, lui a donné toute l'inspiration et les descriptions de Paris qu'il utilisa dans Les Innocents en 1916.
En 1914, il publie au Mercure de France, grâce à l'appui de Rachilde, femme d'A Valette, le patron de la revue, Jésus la Caille, histoire d’un proxénète homosexuel, dont il a écrit la plus grande partie lors de son exil-refuge chez sa grand-mère à Nice. Ce premier roman est applaudi par Paul Bourget. Mobilisé en novembre 1914 à Gray en tant qu'intendant des Postes (il a pour habitude d'écrire des poèmes sur les enveloppes des courriers qu'il distribe aux soldats), il rejoint, grace à l'aide de Jean Paulhan, un corps d’aviation à Avord, près de Bourges, puis à Etampes et enfin à Longwic près de Dijon. Il aura très peu l'occasion de voler et de mettre en valeur son brevet d'aviateur (brevet n° 5016) obtenu le 10 décembre 1916, se blessant au genou gauche et étant assez vite démobilisé.
Il rencontra Colette dans les couloirs du journal L'Éclair en 1917 : « J'ai rencontré une grrrande dame » écrira-t-il à son ami Léopold Marchand. Leur amitié dura jusqu'à la mort de Colette., passant des vacances ensemble en Bretagne, la conseillant pour ses achats de tableaux.
D'autres livres suivront, notamment L'homme traqué (1922) distingué, grâce au soutien de Paul Bourget, par le grand prix de l'Académie française. Exprimant dans une langue forte et riche des sentiments très violents, L'homme traqué est un des romans les plus émouvants de Francis Carco. Viendront ensuite L’ombre (1933), Brumes (1935) dont il dira à la fin de sa vie que ce fut son meilleur roman. Citons également l'Équipe, Rue Pigalle, les Innocents, Rien qu'une femme, Perversité, Vérotchka l'étrangère, l'Ombre, la Lumière noire, l'Homme de minuit.
Francis Carco a aussi écrit ses Souvenirs sur Toulet et Katherine Mansfield, Maman Petitdoigt, De Montmartre au Quartier latin, À voix basse, Nostalgie de Paris, des reportages sur le Milieu, et des biographies de Villon, Verlaine, Utrillo (1938), et Gérard de Nerval (1955).
Son œuvre est riche d'une centaine de titres, romans, reportages, souvenirs, recueils de poésie, mais aussi pièces de théâtre comme Mon Homme qui lancera la rue de Lappe à la Bastille.
Il résida successivement à Cormeillles en Vexin où il rachète le Château Vert, domaine d'Octave Mirbeau avec les espèces nombreuses gagnées avec Mon Homme, puis revint aux pieds de la Butte rue de Douai, puis au 79 quai d'Orsay.
En 1932, à l'occasion de conférences qu'il donne à Alexandrie, en Égypte, il fait la connaissance d'Eliane Négrin, épouse du Prince du coton égyptien Nissim Aghion. Coup de foudre! Il n'hésite pas à « plaquer » sa première femme, Germaine Jarrel (ils divorcent le 6 novembre 1935), au grand dam de ses amis de la Butte, pour accueillir à ses côtés Eliane qui laisse son mari, ses richesses et ses trois enfants en Égypte. Très gentleman, Nissim leur adressera un télégramme de félicitations lors de leur mariage le 11 février 1936.
En septembre 1939, le couple emménagea à L'Isle-Adam, avant de s'exiler à Nice puis en Suisse (Eliane est en effet d'origine juive) où il retrouva son ami le peintre Maurice Barraud qui a illustré, Au coin des Rues (1919), et se lie d'amitié avec Jean Graven, Valaisan poète à ses heures et surtout éminent criminologue représentant la Suisse au procès de Nuremberg et inventeur, à la conférence de Rome , du terme de "crimes contre l'humanité". Après la guerre, il s'installa à nouveau à L'Isle-Adam.
Il décèda le lundi 26 mai 1958 à 20 heures (il était atteint de la maladie de Parkinson), au 18 quai de Béthune, dans l'île Saint-Louis, à Paris. Il meurt le 26 mai 1958, en écoutant L'Ajaccienne jouée par la garde républicaine qui passait sous ses fenêtres. Il est inhumé au cimetière parisien de Bagneux à côté de son frère, Jean Marèze qui s’est suicidé en 1942, et de sa seconde femme, Eliane, décédée en 1970.
Francis Carco a été membre de l'Académie Goncourt le 13 octobre 1937 élu au fauteuil de Gaston Chéreau. Surnommé "le romancier des apaches", il réalisa les plus forts tirages d'édition des années trente.
Il définit son œuvre lui même comme « un romantisme plaintif où l’exotisme se mêle au merveilleux avec une nuance d’humour et désenchantement ». Dans ses livres transparaît l'aspiration à un ailleurs : « Des rues obscures, des bars, des ports retentissant des appels des sirènes, des navires en partance et des feux dans la nuit ». L'enfant battu par son père corse consacra sa vie aux minorités et en fit souvent le sujet de ses romans : Canaques, témoins de ses premières années à Nouméa, prostitués, mauvais garçons.
Francis Carco était le cousin de l'historien et haut fonctionnaire Jérôme Carcopino, et le frère de Jean Marèze, poète et auteur de chansons (Sombre dimanche, Escale, etc.).
De nombreux peintres et illustrateurs ont été associés à ses livres : Maurice Vlaminck, Suzanne Valadon, André Derain, Pierre-Eugène Clairin, Eugène Véder, Louis Legrand, P. Ambrogiani, Chas Laborde, Daragnès. André Dignimont a notamment illustré Perversité (1924), l'Equipe en (1925), Bob et Bobette s'amusent (1930) et Nostalgie de Paris (1946). La Légende et la vie d'Utrillo, ouvrage édité par Seheur en 1927, fut vendu à 105 exemplaires seulement. Francis Carco a écrit des chansons, dont Le doux caboulot, mis en musique par Jacques Larmanjat, chanté par Maie Dubas (1931), L'orgue des amoureux, musique de Varel & Bailly, chanté par Edith Piaf (1949), ou encore Chanson tendre, musique de J. Larmanjat, chanté par Fréhel, en 1935. Carco chanta lui-même cette dernière chanson au Lapin Agile, en 1952.
GuthPaul, Quarante contre un, Paris, Correa, 1947.
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